En 1959, le P. Ignace DICK publiait deux textes[1] qui venaient s'ajouter au écrits arabes de Théodore Abu Qurrah révélés par Arendzen, Bacha puis Cheiko[2].
C'est l'un d'eux, la "confession de foi"[3] que nous présentons ici.
A vrai dire, il ne s'agit pas d'une confession de foi qui prétendrait rivaliser avec celle de Nicée-Constantinople, ou avec les définitions des Conciles oecuméniques. C'est plutôt une affirmation de fidélité à ces définitions, face aux errements théologiques tant anciens que récents à son époque.
Aussi reprenant depuis l'arianisme jusqu'au monothélisme qui sévissait encore de son temps – en passant par le nestorianisme et le monophysisme – il expose la foi orthodoxe[4] telle qu'elle a été défendue par les Pères, mais dans la langue arabe et non dans le grec des Conciles. On notera que – fidèle à lui-même, et quoique le propos soit éminemment technique – Théodore développe sa Confession de foi dans un langage le plus accessible possible.[5]
Cette "profession de foi" peut être séquencée en trois sections :
- La Trinité
- L'incarnation du Verbe
- Propriétés, volontés et activités dans le Christ.
En raison du caractère lacunaire de la biographie de Théodore, il n'est guère possible d'attribuer une date précise à cette "confession de foi". Tout au plus peut-on considérer qu'elle a été rédigée entre 795 (date approximative de sa consécration épiscopale) et 830 (date supposée de sa mort, si l'on considère qu'il a bien participé au débat avec le calife Al-Mamun, en 829).
Un point doit encore être relevé : alors que dans nombre de ses écrits Théodore lutte plus ou moins directement contre l'islam dominant dans la société, cette confession se concentre uniquement sur les questions débattues à l'intérieur de l'Eglise. Seule la suscription ajouté par le copiste rappelle ce contexte.
En effet, le traité débute par la formule "Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, Dieu unique" typique du christianisme de langue arabe, qui affirme d'une part la foi des chrétiens en la Trinité – ce qui le différencie rigoureusement de l'islam – et d'autre part réfute l'accusation de trithéisme qui est parfois portée contre les chrétiens.
Nous proposons ci-après ce traité dans la traduction de Dick, que nous avons à peine, en quelques lieux, modernisée. Toutes les modifications un tant soit peu conséquentes ont été signalées.
Notes
[1] "Deux écrits inédits de Théodore Abuqurra", présentation, texte arabe et traduction par P. Ignace DICK, in "Le Muséon" tome 72, 1959.
[2] Voir bibliographie. Les traités édités par Arendzen, Bacha et Cheiko ont été traduits en allemand par Graf. La plupart des traités d'Abu Qurrah ont été traduits par John Lamoreaux "Theodore Abu Qurrah translated", 2005
[3] On en trouvera une traduction anglaise dans LAMOREAUX "Theodore Abu Qurrah translated", 2005, p 151.
[4] Dans la mesure où les monothélites étaient eux aussi des melkites, recevant le concile de Chalcédoine, il a bien fallu définir la confession de foi d'Abu Qurrah comme "orthodoxe", et non pas seulement comme "melkite". Voir en Annexe la question des relations des maronites médiévaux au monothélisme.
[5] On s'en convaincra définitivement si on compare à la "Confession de foi" de Théodore, le texte d'un autre melkite, "L'épître sur les croyances des chrétiens" de 'Afif ibn Mu'ammal (traduction de G. Troupeau, 2006).